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Khamenei critiqué après l’exécution de Ruhollah Zam

décembre 6, 2020
Ehsan Mehrabi
Lecture de 5 minutes
Le religieux chiite Mahmoud Amjad a vivement critiqué l'exécution du journaliste Ruhollah Zam.
Le religieux chiite Mahmoud Amjad a vivement critiqué l'exécution du journaliste Ruhollah Zam.
Mahmoud Amjad a également reproché à Ali Khameini les effusions de sang survenues en Iran depuis 2009.
Mahmoud Amjad a également reproché à Ali Khameini les effusions de sang survenues en Iran depuis 2009.

Jeudi 17 décembre 2020

Quelques jours après l'exécution du journaliste dissident Ruhollah Zam, Mahmoud Amjad, un religieux chiite réputé, a fait part de sa colère dans un enregistrement vidéo daté du 15 décembre. Il s’en prend au Guide suprême l'ayatollah Ali Khamenei, et le tient responsable de toutes les effusions de sang survenues en Iran depuis 2009. Il appelle à tous les représentants religieux d’Iran à ne rester silencieux. 

Qui est Mahmoud Amjad? 

*** 

L'ayatollah Mahmoud Amjad avait déjà pris la parole pour s’opposer aux violences survenues lors des manifestations de 2009. Mais ses récentes remarques sur l'exécution de Ruhollah Zam son encore plus sévères à l’égard du régime. 

L'ayatollah Amjad connaissait Ruhollah Zam lorsqu’il vivait en Iran et en Malaisie. Il fréquentait également son père. Bien qu'il ait déjà critiqué le Guide suprême et pris ses distances avec lui et ses alliés, c'est sans doute ce lien personnel et amical qu’il entretenait avec la famille Zam qui explique le ton de ses récents commentaires.

L'ayatollah Amjad a déclaré que Ruhollah Zam était un « martyr », victime de l'oppression, dont le sang a été injustement versé. Il est allé plus loin en expliquant que toutes les victimes de la République islamique de ces 40 dernières années étaient elles aussi des martyrs. 

Mahmoud Amjad est notamment revenu sur un sermon de l'ayatollah Khamenei datant de 2009 et qu’il a qualifié « sanglant ». A la suite de ce discours, il aurait dit à son fils que « l'arrogance a donné des coups de pieds et détruit M. Khamenei, la révolution, l'islam, le clergé, l'imam et tout le reste ; après ce sermon, il y a eu un bain de sang. » 

L'ayatollah Amjad a déclaré que Khamenei était responsable de toutes les effusions de sang survenues en Iran depuis 2009. 

Il a également dénoncé le silence du bureau de l'ayatollah Seyed Ali Sistani concernant dont le nom a beaucoup circulé dans l’affaire Ruhollah Zam. 

Le 15 décembre, un proche de l'ayatollah Sistani a fait part de sa colère à IranWire. Des agents de renseignement iraniens et irakiens avait utilisé son nom pour tendre un piège à Ruhollah Zam. Selon cette même source, Sistani aurait condamné l'exécution, mais pas publiquement. 

Avant 2009, l'ayatollah Mahmoud Amjad était moins connu du grand public iranien, mais il était apprécié de la jeune génération de représentants religieux pour sa maîtrise de l’éthique. Il gagne en notoriété auprès des étudiants à partir des années 1990, grâce à ses visites régulières dans les foyers des universités dont celles de Téhéran. Il se lie aux représentants du Guide suprême dans les établissements d’enseignement. 

Il devient en quelque sorte un représentant permanent de l’autorité du Guide suprême au sein de nombreux programmes universitaires. Des émissions de télévision lui sont dédiées et sa popularité atteint son paroxysme à la fin des années 1990, particulièrement à Qom et à Téhéran

Les premières années 

Mahmoud Amjad est né en 1939 à Kangavar, dans la province de Kermanshah. Après avoir terminé ses études secondaires, il se rend à Qom pour y suivre des études religieuses. 

Suite à la révolution de 1979, Amjad officie pendant quelque temps le vendredi à la mosquée de Nahavand. 

Il a déclaré plus tard avoir délibérément évité de rencontrer Ruhollah Khomeini, le leader de la révolution, lors des premiers jours de la République islamique.  « Je ne me suis pas permis de le rencontrer. Je craignais que l'Imam m'interroge sur la situation, et que je doive lui répondre qu’elle allait à l’encontre de mes croyances. J'aurais alors contrarié l'Imam [Khomeini]. Je me suis donc empêché de le rencontrer. »

Dans les années 1990 et au début des années 2000, l'ayatollah Amjad fait partie d’un groupe de représentants du Guide suprême dans les universités et accompagne les pèlerinages d’étudiants au Hadj. Dans ses discours, cependant, il n'exprime aucune position politique, préférant s’en tenir aux questions morales. Certaines personnalités réformistes assistent à ses événements. 

En 2009, la situation change. Il soutient la candidature à la présidentielle de Mir Hossein Moussavi. « Je suis convaincu de l'honnêteté de M. Moussavi, et même si le monde entier dit le contraire, je ne renierai pas cette certitude », dit-il. 

« Si j'étais l'imam, j'aurais renvoyé cette personne », déclare-t-il à propos du futur président élu, Mahmoud Ahmadinejad, à la suite des débats présidentiels. 

L'ayatollah Amjad critique ensuite la répression des manifestants. En 2011, il se rend en Malaisie, et selon le site Web Kalameh, sa femme et sa petite-fille qui ont tenté de le rejoindre là-bas sont interdites de quitter le territoire iranien. 

À l'époque, des groupes réformistes se réunissent régulièrement en Malaisie et beaucoup s'y sont rendus après l'élection présidentielle de 2009. Les médias principalistes conservateurs critiquent ces réunions et  affirment qu'elles sont financées par des fabricants de produits alimentaires comme la compagnie Shirin Asal.

Certains de ces médias s’en prennent alors directement à Amjad. Ils rapportent par exe ;ple qu’Azizolah Khoshvaght, professeur d’éthique et beau-père de Mostafa Khamenei, le fils du Guide suprême, avait  rompu ses liens avec Mahmoud Amjad en raison de ses rencontres avec des réformistes. Ces attaques ont un impact limité et de courte durée, en comparaison à d’autres attaques émises à l’encontre d'autres religieux et réformistes au franc-parler, qui dans certains cas ont duré des années. 

Quelque temps plus tard, toutefois, des divisions se creusent au sein d'un groupe de militants politiques et de journalistes basés en Malaisie, dont certains finissent par migrer vers d'autres pays. L'ayatollah Amjad rentre en Iran et se présente à l'élection de l'Assemblée des experts en 2015, mais le Conseil des gardiens ne valide pas sa candidature.

Amjad a continué d’adopter une position critique après son retour en Iran. Un peu plus tôt cette année, il s’exprime sur le sujet vol 752 d'Ukraine International Airlines cette fois, abattu par les gardiens de la révolution. « Le crash d'un avion de ligne et ses causes sont bien assez tragiques, mais la malhonnêteté et l'insuffisance de [certains] responsables de haut rang dans ce dossier représentent une bien plus grande tragédie. » 

Il est devenu de plus en plus critique à l'égard de l'ayatollah Khamenei lui-même, comme le montrent ses commentaires récents sur Ruhollah Zam. Compte tenu de son influence parmi les religieux de la jeune génération, ses commentaires et sa position n'auront sans doute pas échappé au Guide suprême de la République islamique : cela pourrait lui porter gravement préjudice.

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