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Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

janvier 15, 2021
Hannah Somerville
Lecture de 23 minutes
Des partisans du Hezbollah participent à une manifestation organisée par la commission islamique des droits de l'Homme (IHRC), une ONG londonienne qui soutient l'Iran.
Des partisans du Hezbollah participent à une manifestation organisée par la commission islamique des droits de l'Homme (IHRC), une ONG londonienne qui soutient l'Iran.
Plusieurs institutions, dont le Centre islamique anglais, ont été créés à Londres par des émissaires personnels de l'Ayatollah Khamenei.
Plusieurs institutions, dont le Centre islamique anglais, ont été créés à Londres par des émissaires personnels de l'Ayatollah Khamenei.
De hauts responsables iraniens comme Saied Reza Ameli (ci-dessus) ont participé à la création sociétés.
De hauts responsables iraniens comme Saied Reza Ameli (ci-dessus) ont participé à la création sociétés.
Une école et une université font partie des institutions culturelles émanant de la République islamique dans la capitale britannique.
Une école et une université font partie des institutions culturelles émanant de la République islamique dans la capitale britannique.
Le militant Raza Kazim de l'IHRC indépendant s'exprime au micro de l'agence iranienne PressTV.
Le militant Raza Kazim de l'IHRC indépendant s'exprime au micro de l'agence iranienne PressTV.

Dimanche, 22 November 2020

Depuis des siècles, les régimes autoritaires cherchent à contrôler leur image.

Plus l’état est violent, répressif et irresponsable, plus il se soucie du regard des autres : celui de ses propres citoyens, et celui d’autres états et acteurs internationaux.  

La république islamique d’Iran illustre parfaitement ce constat puisque chaque année, d’importantes sommes provenant de fonds publics iraniens sont transférées vers des institutions favorables au régime, actives à l’étranger. Leur objectif : améliorer l’image fragile de l’Iran sur la scène internationale et diffuser les principes idéologiques de la république islamique. 

Ces entreprises pro-iraniennes représentent, quelquefois à leur insu, le régime au sein de la diaspora iranienne. Parmi elles se trouvent des médias comme le service Radio-Télévision de la République islamique d’Iran (IRIB) et la chaîne Press TV, mais aussi des organes de désinformation, des institutions culturelles et des associations locales financées par le régime. 

Dans cette série d’articles, les journalistes d’IranWire ont enquêté sur les modes de diffusion de la propagande de la république islamique d’Iran à travers le monde. Nous avons travaillé avec des journalistes de différents pays pour identifier les soutiens du régime iranien, leurs méthodes de propagande, et l’impact néfaste qu’ils peuvent avoir sur les sociétés locales.

Le premier article de cette série présente sur les incursions du Hezbollah et de la République islamique d'Iran en Argentine. Le second s’intéresse à l'alliance, opérée grâce au soutien de plusieurs médias, entre le Mouvement islamique du Nigéria et le régime iranien. Le troisième montre comment l'Iran s'est inséré dans le paysage d'après-guerre en Bosnie-Herzégovine. Dans ce quatrième article, la journaliste Hannah Somerville enquête sur la diffusion de la politique religieuse et de la diplomatie iranienne à Londres.

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde
Le grand ayatollah Mohammed Fazel Lankarani (à droite) avait pour espoir de créer une institution chiite dans cette rue londonienne. Le projet ne s'est finalement jamais réalisé.

Été 2007. Le grand ayatollah Mohammed Fazel Lankarani, une sommité chiite très respectée en Iran, meurt à l'âge de 79 ans. Lankarani a eu le temps d’inscrire dans son dernier testament un dernier souhait: « Je veux qu'une institution soit établie à Londres, cette porte d'entrée sur le monde et la deuxième patrie de tous les pays… pour diffuser les enseignements des 12 Chiites »

Le rêve d’une mission religieuse implantée à Londres et soutenue par l’Iran ne s’est finalement jamais concrétisé. Ses exécuteurs testamentaires ont pourtant fait l’acquisition d’une propriété à Londres d’une valeur avoisinant le million d’euros  puis établi une société anonyme britannique pour la succursale londonienne du Centre de Jurisprudence des imams purs de Qom. Mais c’est tout. En 2014, l'entreprise est radiée, après avoir déclaré £1 à £2 de revenus annuels depuis 2008. 

Le projet de Lankarani échoue sans doute car, non loin de là, d'autres institutions mieux financées se sont déjà ancrées dans la vie sociale et culturelle de la capitale britannique. Ayant élu dans le nord-ouest de Londres, dans les quartiers de Brent et de Maida Vale, de nombreux groupes et entités suivent les principes de l'Islam des douze chiites, qui compte  plus de 100 000 adeptes au Royaume-Uni. De plus, Londres est une métropole mondiale cosmopolite dont les maires sont souvent issus d’une gauche socialiste, alignée sur une vision du monde anticapitaliste et anti-impérialiste. Certains peuvent y trouver un terrain fertile pour promouvoir, intentionnellement ou non, les politiques culturelle et étrangère du régime iranien. La situation est complexe et les personnes impliquées sont nombreuses (NDLR une liste non exhaustive de personnalités est disponible à la fin de cet article). 

Le 12 octobre 2020, l'ayatollah Khamenei développe dans un long discours prononcé devant des diplômés de l'académie militaire la notion de l’« invasion culturelle » de l'Iran par l'Occident. « Lorsque nous avons parlé d’invasion culturelle… l’ennemi a perdu son sang-froid et a tenté de résister à la 'lutte contre l’invasion culturelle' avec sa propagande.» Naturellement, le Guide suprême n’aura eu le courage de citer aucune institution culturelle, dont il a pu bénéficié, en son nom propre ou celui du régime iranien sur ce qu'il appelle le sol « ennemi ». Ils sont pourtant nombreux à travers l'Europe, Londres incluse. 

La danse des émissaires 

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

Le centre islamique d'Angleterre à Londres 

Au début des années 1980, l'ayatollah Ruhollah Khomeiny envoie des diplomates et agents d’état de confiance dans plusieurs pays. Ces émissaires ont pour mission d’identifiés des partenaires et des alliés potentiels (mais aussi pour éliminer ses ennemis à l'étranger). Après sa mort en 1989, son successeur, l'ayatollah Ali Khamenei, continue ces opérations à l'étranger.

La République islamique compte désormais plusieurs dizaines de missions diplomatiques à travers le monde. Dans la plupart, un attaché culturel est chargé de gérer un généreux budget destiné à la sensibilisation des populations. Des mosquées chiites, financées et gérées par une marja chiite comme le veut la tradition, existent aussi. En Iran, la légitimité du régime islamique dépend de l’approbation de ces marjas, de grands ayatollahs qui dispensent les enseignements de l'Islam. En plus de percevoir les dons de leurs fidèles, les marjas qui soutiennent le gouvernement iranien et le Guide suprême, sont à leur tour également financés par le régime. 

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

L'ambassade d'Iran à Londres 

Les représentants officiels de l’Iran à l’étranger auraient joui parfois d’une trop grande indépendance, selon l’ayatollah Khamenei. Les attachés culturels d'ambassade, par exemple, sont choisis non pas par le Guide suprême mais par un département du ministère iranien de la Culture et de la Guidance islamique, appelé l'Organisation pour la culture et les relations islamiques (ICRO), qui a toujours été historiquement composé de personnels d'un penchant plus réformiste que les partisans, plus traditionalistes, de Khamenei. 

Khamenei s’est donc appuyé sur une entité nommée l’Organisation de développement islamique pour développer un appareil culturel parallèle à la fois à l'intérieur et à l’extérieur du pays. Les institutions qui en sont issues sont réparties dans plusieurs pays d'Europe occidentale. Établir un lien entre ces organisations et le Guide suprême, des décennies plus tard, n'est pas mince affaire : on les reconnaît lorsqu'ils sont dirigés par un religieux ou par un fonctionnaire de l'État, représentant spécifique de Khamenei. A Londres, ce sont les attachés de presse du Guide suprêmequi permettent de les identifier.

Le Centre islamique d'Angleterre (fondé en 1998)

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Le Centre islamique d'Angleterre se trouve dans le quartier de Maida Vale à Londres. abrita tour à tour une ancienne salle de cinéma et de music-hall, puis une branche de la chaîne de jeux Mecca Bingo 

Le plus connu des bastions idéologiques du gouvernement iranien à Londres se trouve dans la rue principale du quartier de Maida Vale à Londres. Il est aisément reconnaissable par ses deux tours en dôme de cuivre qui s'élèvent au-dessus des magasins animés et des restaurants de plats à emporter en contrebas. Décoré de céramiques blanches et bleues, et orné de calligraphie persane, le bâtiment ne divulgue aujourd'hui aucune trace de son passé. De 1913 à 1940, le Picture Palace au 140, Maida Vale était une salle de music-hall et de cinéma de luxe très fréquentée. Puis, à partir des années 1960, il commença à accueillir les joueurs de bingo venu se divertir au Mecca Bingo. 

La salle de jeux est achetée par des Iraniens en 1997, au coût alors stupéfiant de 1,4 million d’euros. Le Centre islamique d’Angleterre a été créé par l’ayatollah Mohsen Araki, à l'époque l'envoyé personnel de Khamenei au Royaume-Uni, venu en Grande-Bretagne en 1994.

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L'ayatollah Mohsen Araki crée Le Centre islamique d'Angleterre (Islamic Centre of England Limited) en 1995. Il est, à l'époque, le représentant de l'ayatollah Khamenei à Londres 

Le Centre islamique d'Angleterre (Islamic Center of England Limited – ICEL) est enregistrée en Angleterre en 1995. Les documents de la société stipulent qu'« à tout moment, au moins l’un des administrateurs doit être un représentant du Guide spirituelle suprême de la République islamique d’Iran »

Au milieu des années 2000, ce poste est repris par Abdolhossein Moezi, un religieux né à Téhéran qui avait auparavant servi en tant qu'envoyé personnel de Khamenei en Autriche et qui avait présidé le Centre islamique Imam Ali de Vienne jusqu'en 2004. L'actuel chef de l'ICEL est Mohammad Ali Shomali, qui travaillait auparavant à l'Institut d'éducation et de recherche Imam Khomeini. L'institut est dirigé par le très conservateur Mohammad-Taghi Mesbah Yazdi

Après les célébrations des fêtes de l'Achoura au Centre islamique en 2016, Shomali reçoit une lettre du chef du Département des relations internationales du Bureau du Guide suprême le remerciant pour ses « efforts désintéressés et son travail précieux » en tant que « représentant respecté de Son Excellence le Grand Ayatollah Khamenei »

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Une cérémonie annuelle commémorant l'ayatollah Khomeiny à l'ICEL 

En 1997, les premiers comptes de l’ICEL indiquent qu’elle a dégagé un bénéfice de 40 600 euros cette année-là – ce qui exclut les 1,4 millions d’euros « donnés par les administrateurs » pour couvrir l’achat du bâtiment. En 2018, année de ses derniers comptes déposés, il disposait de plus de 4,5 millions d’euros dans sa trésorerie. 

Le bâtiment de Maida Vale est devenu un lieu de rencontre de nombreux membres de la communauté musulmane de Londres. Ouvert tous les jours de l’année, il dispose d'une mosquée, de deux salles de conférences, d'une bibliothèque et d'une librairie. Parmi les missions officielles du Centre islamique figurent celles « de fournir des conseils spirituels à la communauté musulmane dans son ensemble», « de diffuser une connaissance authentique de l’islam » et « de fournir aux non-musulmans une meilleure compréhension plus claire de l’islam »

Le site Web du Centre islamique indique que ses membres viennent « de divers horizons et de modes de vie variés ». Mais il n'est indiqué nulle part sur sa page de présentation qu'il est détenu et contrôlé par des responsables de la République islamique d'Iran. ICEL n'a pas souhaité répondre aux questions d'IranWire portant sur la raison de cette discrétion. 

L’ICEL se garde bien de publier des articles compromettants sur son site Internet, mais à l’occasion de certains événements, il se lance dans la promotion active de discours anti-occidentaux et anti-israéliens de l’ayatollah Khamenei. En juin 2020, l'ICEL reçoit un avertissement du régulateur britannique, la Charity Commission. Le 3 janvier 2020, ICEL, qui s'affiche comme un organisme spirituel, avait organisé au 140 Maida Vale un hommage pour le général Ghassem Soleimani, le commandant de la Force Qods du Corps des Gardiens de la révolution islamique, tué par les forces américaines en janvier 2020. Le lendemain, ICEL avait lancé un autre événement pour le chef militaire décédé, affichant condoléances et louanges pour Soleimani sur son site Internet. La Commission a conclu que l'organisation s'était rendue coupable d'abus de confiance et de faute, et le directeur des enquêtes, Tim Hopkins, l'avait mis en garde: « Nous sommes préoccupés par l'effet corrosif que cela pourrait avoir sur la confiance du public dans cet organisme de bienfaisance et dans d'autres. »

Saied Reza Ameli : le tsar numérique iranien à Londres

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Le responsable iranien Saied Reza Ameli a participé à la création de plusieurs institutions culturelles pro-République islamique à Londres 

L'une des personnalités les plus importantes de la construction des incursions idéologiques de l'Iran à Londres est Saied Reza Ameli. Le secrétaire du Conseil suprême iranien de la révolution culturelle depuis 2019, ancien membre directement nommé du Conseil suprême du cyberespace à partir de 2015, rédacteur en chef conservateur d’un Journal iranien des études du cyberspace, directeur des communications et doyen de la faculté des études mondiales de l'Université de Téhéran - et propriétaire depuis 2003 d'un appartement estimé à 252 000 euros, dans un quartier recherché du nord de Londres. 

En 1993, Ameli participe au lancement de la branche britannique éphémère  du Tehran Times à Londres avec son directeur général de l'époque, Mohammad Soltanifar, qui a ensuite occupé le poste de vice-ministre iranien de la Culture. Ameli est aussi le fondateur du Centre islamique d'Angleterre (ICEL) avec l'ayatollah Mohsen Araki. Plus tôt cette année, BBC Persian a révélé qu'entre 1999 et 2001, Ameli avait également codirigé deux autres sociétés britanniques avec Ardeshir Fathinejad, l'ancien chef de cabinet du ministère du Pétrole, des sociétés appelées Eram Limited et Pars Cultural Group Limited. L'objectif de ces entreprises aujourd'hui disparues n'est toujours pas clair.

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Saied Reza Ameli a co-créé deux entreprises britanniques avec Ardeshir Fathinejad, l'ancien chef du ministère du Pétrole 

Depuis 2006, Saied Reza Ameli fait partie de l’équipe dirigeante d’un groupe de pression controversé basé à Londres appelé la « Commission islamique des droits de l'homme » (IHRC). Il continue d’y participer activement malgré ses nouvelles responsabilités au sein de l’appareil étatique iranien. 

La Commission islamique des droits de l'homme (fondée en 1997) 

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La IHRC organise le défilé annuel de la Journée Qods à Londres, où les tensions se sont multipliées à plusieurs reprises et où certains participants ont arboré des drapeaux du Hezbollah 

La Commission islamique des droits de l'homme est une ONG basée à Wembley, à l'ouest de Londres. Depuis 2007, il détient un statut consultatif spécial auprès de l'Organisation des Nations Unies. Cet organisme de bienfaisance affirme que sa mission – celle qui lui permet de beneficier d'un allégement fiscal en Grande-Bretagne – est de : « promouvoir les droits de l'homme, l'égalité et la diversité (en particulier de bonnes relations raciales) à travers le monde pour le bénéfice du public ». 

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Le co-fondateur de l’IHRC, Massoud Shajradeh, est un partisan de l'ayatollah Khomeiny 

En plus de ses campagnes sur des dossiers tels l'autodétermination palestinienne et les détenus de Guantanamo, l'IHRC qui est présidée par un homme d'origine iranienne, Massoud Shajradeh, promeut constamment une rhétorique pro-khomeiniste et fait l'apologie du Hezbollah. 

Sa « Charte pour l'unité musulmane » rédigée en 2006 a été co-écrite par Mohammad al-Asl, un prédicateur résidant à Washington, qui a publiquement prêté allégeance à Ali Khamenei en 1994 et qui, comme Khamenei, ne reconnaît pas le nombre officiel de Juifs tués pendant la période de l'Holocauste. Il a appelé à la « liquidation » des Israéliens. Le président de l'IHRC, Massoud Shajradeh, quant à lui, a feint d’ignorer les violations des droits de l’homme en Iran, déclarant en 2011  à un journaliste qui s'interrogeait sur les revendications du Mouvement vert: « Je ne sais pas de quoi vous parlez ». Shajradeh a fait l'éloge de Khomeiny lors d'événements publics, soulignant, comme l'a fait Khomeiny, la nécessité de s'opposer à Taghut - un terme utilisé par le gouvernement iranien pour désigner l'Occident et ses alliés. La résistance peut inclure le fait d'éviter l'autorité des tribunaux non islamiques.

À Londres, l'IHRC organise les manifestations annuelles à l'occasion de la Journée Qods, où les drapeaux du Hezbollah sont souvent de sortie, ainsi que des affrontements entre des membres de l'IHRC et des contre-manifestants de Londres. Le militant de l'IHRC Raza Kazim a été impliqué dans une violente altercation avec la police métropolitaine de Londres lors de la journée de Qods en 2011 : il avait crié que les officiers « encourageaient » les contre-manifestants iraniens. En 2017, le directeur de l'IHRC, Nazim Ali, fait l'objet de poursuites en justice, classées sans suite, pour une série de propos tenus lors du rassemblement de soutien aux victimes de l’incendie de la tour Grenfell, notamment lorsqu'il accuse les autorités de « sionistes . L'IHRC a également affirmé que la qualification du Hezbollah en tant que groupe terroriste par le Royaume-Uni est « une capitulation face aux voyous de droite et aux voix minoritaires sionistes », tandis que Shajradeh a assuré qu’elle résulte directement « de deux années de campagne sioniste »

Au cours de ses 23 années de fonctionnement, l'IHRC a accusé plus de 50 pays de maltraitance vis-à-vis de la communauté musulmane. Mais alors que l'IHRC appelle la police métropolitaine à arrêter les groupes anti-islamiques d'opposition à la République d'Iran, l'organisation n'a jamais pris la défense de victimes de violations des droits humains en Iran. L'IHRC entretient une relation de bonne entente avec PressTV, un média contrôlé par l’État iranien, dont l’ancien directeur de l'Information, Roshan Muhammed Salih, a pris la parole lors de plusieurs événements de l'IHRC, tandis que Shajradeh et d’autres membres de l'IHRC continuent de disposer d'une plateforme d'expression sur PressTV. 


 

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Le cofondateur Arzu Merali (à gauche) a reçu un prix des droits de l'homme parrainé par l'État iranien 

En 2016, un autre co-fondateur de l'IHRC, Arzu Merali, a reçu un « prix » des droits de l'homme du gouvernement iranien lors d'une cérémonie à Téhéran présidée par l'ayatollah Sadegh Larijani, alors chef du pouvoir judiciaire. En 2017, elle déclare lors d’un évènement appelé « Strike the Empire Back » (en Français, 'Contre-attaquez l'Empire'): « Nous savons qui est l'ennemi. C’est l’Occident, ce sont les pays de l’OTAN, c’est la structure suprématiste blanche ou la structure libérale ou quelque soit le nom que vous voulez lui donner, malgré ses protestations de neutralité. » 

IranWire a demandé à l'IHRC si elle bénéficiait d'un financement de la République islamique, et l'a interrogé sur l'étendue du contrôle de Saied Reza Ameli sur la portée et la direction de ses projets, mais la Commission a estimé que nos questions étaient islamophobes et qu'IranWire « aidait avec bonheur à perpétuer les injustices systémiques qui imprègnent la société dans laquelle nous vivons ». La Commission a insisté sur le fait qu'elle n'entretenait aucun lien avec aucun gouvernement, officiellement ou officieusement. IranWire a également posé des questions sur l’absence de campagnes portant sur des violations des droits de l’homme en Iran, sur le site Internet de l'IHRC. L'IHRC n'a pas abordé cette question mais nous a invités à « revenir vers nous si vous avez des questions sérieuses » sur les droits de l'homme. 

En février 2020, la Commission islamique des droits de l'homme a déposé une plainte contre le journal britannique The Times, affirmant qu'il avait publié un contenu « trompeur » en déclarant que l'IHRC avait des « liens avec l'Iran » et en citant un militant qui a déclaré: « Téhéran utilise ce groupe pour faire passer sa propagande ». L’Organisation indépendante des standards de la presse a rejeté la plainte, estimant que la couverture du Times était exacte.

Le Collège islamique (fondé en 1996) 

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Le professeur du Collège, Amir de Martino, a écrit dans le magazine mensuel de l'ICEL que le gouvernement américain était peut-être la « main cachée » derrière le 11 septembre 

L’actuel responsable du programme de B.A. (Bachelor of the Arts, équivalent de la licence en France) en études islamiques du Collège est un ancien étudiant d'origine italienne, Amir de Martino, qui est également le rédacteur en chef du magazine mensuel de l’ICEL, Living Islam. En juin 2012, l'organisation caritative juive et britannique Community Security Trust a tiré la sonnette d'alarme au sujet d'un article datant de mai 2012 dans le magazine, où de Martino a fait l’apologie d’une théorie complotiste selon laquelle le terroriste d'extrême droite Andreas Breivik, qui a tué 77 personnes en Norvège en 2011, était « en réalité un ultra-sioniste, franc-maçon, islamophobe » dont les véritables penchants étaient dissimulés par les médias. Breivik, a-t-il dit, a pu « agir suivant les propos du chef de la Maison Blanche » parce que « [la Norvège] présentait la possibilité que le gouvernement des État-Uni (sic) aurait pu être la main cachée derrière l'attaque du 11 Septembre 2001. » 

L'école de la République islamique d'Iran (fondée en 1997) 

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Le Collège islamique a été créé en 1996 par Mohsen Araki

Le Collège islamique est un établissement d'enseignement basé à Willesden, au nord-ouest de Londres. Il a été créé en 1996 avec sa branche de collecte de fonds, l’Irshad Trust, par l’ayatollah Mohsen Araki, alors représentant de Khamenei. Au cours de sa première année de fonctionnement, l'Irshad Trust a reçu des « dons » de plus de 1.5 millions d’euros. Depuis, le successeur d’Araki, Abdolhossein Moezi, a également occupé le poste d’administrateur. 

Le Collège propose des cours de premier et de troisième cycle en études islamiques, validés par la Middlesex University de Londres. Il a également un séminaire chiite rattaché, le Hawza Ilmiyya d'Angleterre, et reçoit plus d'un million d’euros par an de donations. Il vise, dit-il, à « promouvoir une nouvelle approche de l'étude de l'islam et des musulmans » et s’inscrit dans un parcours académique de l'enseignement supérieur au Royaume-Uni. 

Le livre de Khamenei sur la pensée islamique est en vente à la librairie du collège. Le premier directeur du Collège islamique était Mohammad Jafar Elmi, directeur adjoint de l’éducation de l’Université internationale Al-Mustafa de Qom, le principal séminaire du gouvernement iranien chargé de former des étudiants non iraniens. Le site Internet d'Al-Mustafa décrit le Collège de Londres comme l'une de ses « branches internationales et écoles affiliées » - bien qu'aucune allégeance de ce type ne soit déclarée sur les pages Internet du Collège islamique, une question à laquelle le Collège a refusé de répondre lorsqu'il a été contacté par IranWire. Le 133 High Road, adresse du Collège depuis 1998, appartient en partie au tsar numérique du Guide suprême, Saied Reza Ameli, aux côtés de membres de l'Irshad Trust. Le collège n'en a pas expliqué les raisons. 

En 2006, une nouvelle controverse éclate après des plaintes des étudiantes. Le Collège islamique enseigne alors un module d'introduction à la loi islamique basé sur un texte du 13ème siècle qui décrivait les non-musulmans comme des « ordures » et les comparait à des porcs et à des chiens. Le professeur enseignant le module déclare que l'idée n'était pas d'enseigner la jurisprudence islamique à travers ce document, mais de familiariser les étudiants avec les textes classiques. 

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

Cette école du nord-ouest de Londres était autrefois une école primaire de l'Église d'Angleterre. Le bâtiment situé au 100 Carlton Vale a été acheté par l'ambassade d'Iran en 1997 et a rouvert ses portes sous un nouveau nom en 2007. À partir de 2013, le ministère iranien de l'Éducation a été répertorié comme propriétaire, suivi à partir de 2018 par un homme du nom de Seyed Abbas Hosseini. 

L'école enseigne le programme scolaire national iranien, en persan, à des enfants en majorité iraniens et anglo-iraniens, âgés de 6 à 16 ans. En 2010, des inspecteurs de l' Ofsted , l’organe britannique de régulation des écoles, notent que « De nombreux élèves retourneront en Iran pour terminer leurs études, ce qui est l’un des objectifs de l’école. » 

Cependant, le nombre d'élèves inscrits passe à 132, malgré une capacité de 81 élèves. Depuis une dizaine d'années maintenant, l'école ne respecte pas les normes éducatives britanniques : le rapport le plus récent d’Ofsted lui attribue de nouveau le niveau « Insuffisant ». Selon les inspecteurs, l’école ne prend pas de bonnes mesures éducative, et les élèves sont en retard en lecture et en sciences. Fin 2019, le ministère de l'Éducation lance un avertissement à l'école pour « manquements réglementaires graves » et lui a ordonne de procéder à des vérifications du casier judiciaire de chaque membre du personnel qu'elle emploie depuis 2007.

Il existe très peu d'informations accessibles au public sur l'École de la République islamique d'Iran ou sur ses pratiques d'enseignement. Elle n'a pas de site Internet, ce qui est inhabituel pour une école anglaise, et l'identité des membres de son conseil d'administration n’est pas publiée. 

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

Le religieux chiite controversé Shaykh Hamza Sodagar a été invité à donner une série de conférences à l'école en 2016 

En octobre 2016, l'école accueille une série de conférences animées par le religieux chiite américain Shaykh Hamza Sodagar, un fervent supporter de la République islamique. L'ancien étudiant séminariste de Qom, qui s'est également exprimé à l'ICEL, a publié par le passé une biographie de 30 minutes de Khamenei pour prouver qu'il était « sans aucun doute

l'un des érudits les plus justes » et la personne la plus qualifiée pour diriger la République islamique d'Iran. Shaykh Sodagar a également plusieurs fois suggéré, à la manière de Khamenei, que le 11 septembre était « un projet israélien », et affirmé que les Américains et les Européens étaient des marionnettes de groupes de pression juifs, précisant qu'« un réseau sioniste de médias essaie de contrôler l'esprit des gens ». Une vidéo datant de 2010 le montre expliquer comment assassiner des personnes homosexuelles, d’après la loi islamique. 

La mission islamique d'Ahlulbayt (fondée en 2003)

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

Mohsen Araki prononce un discours à un événement organisé par la mission islamique Ahlulbayt en août 2018.

Après le tollé médiatique britannique suscité par la visite de Shaykh Sodagar, l’organisation qui l’avait invité à Londres prend sa défense. La Mission islamique Ahlulbayt (AIM), une organisation à but non lucratif également basée à Londres, insiste : la proposition de Sodagar reflète « une position claire et indéniable qui est défendue par l'islam telle qu'elle existe dans les écritures et dans la tradition islamiques » mais qu'elle ne peut être pratiquée en dehors des pays musulmans. 

L'AIM est une organisation islamique qui cherche à promouvoir l'islam chiite des 12 imams et, selon son site Internet, à « susciter un mouvement social pour hâter le retour du Sauveur attendu, l'Imam al-Mahdi » en donnant du pouvoir aux communautés musulmanes anglophones et en faisant progresser les « valeurs de dignité, d’honneur, de justice et de droits de l’homme pour tous les peuples à travers le monde ». Ce groupe de pression n'a aucune relation directe avec la République islamique d'Iran, bien que son seul directeur, Samir Haidari, ait brièvement dirigé une autre société basée à l'adresse de l'ICEL et appelée « Ahlul Bayt Assembly of UK and Republic of Ireland », après avoir succédé en 2016 à l'émissaire du Guide suprême, Abdolhossein Moezi. Il n'y a aucune trace des activités menées par cette organisation, et l'AIM affirme que les deux groupes n'ont rien à voir l'un avec l'autre. 

 

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

En 2006, l'AIM déclare qu'elle n’accordera aucune interview à la British Broadcasting Corporation (BBC) décrite comme « sioniste ».

En raison de son affiliation spirituelle aux dirigeants iraniens, depuis sa création en 2003, l'AIM a fait la promotion des enseignements de l'ayatollah Ali Khamenei sur son site Internet et organisé des séminaires avec d'éminents responsables du régime, dont l'ayatollah Araki, l’un des représentants du Guide. Il organise un événement  commémoratif annuel pour Khomeini à l'ICEL, et Samir Haidari, décrit comme un militant britannique, a été interviewé pour le site officiel de l'ayatollah Khomeiny.

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

Le fondateur de l'AIM, Samir Haidari, est présenté sur le site officiel de l'Imam Khomeiny 

L'AIM publie un contenu en anglais reflétant la politique étrangère du régime iranien, ainsi que des récits sur les États-Unis, l'Occident et Israël. Parmi ceux-ci, un article  intitulé « Pourquoi on ne doit pas faire confiance aux États-Unis », une déclaration publique sur son refus d'évoquer la guerre du Liban de 2006 avec la BBC « sioniste » et des déclarations d'Araki sur la « corruption » des États-Unis dans la foulée de l'assassinat de George Floyd, ainsi que l’article d'un professeur de l'Université de Téhéran dénonçant le « déficit de dignité » de pays comme le Japon et la Corée du Sud par rapport à la louable « culture de résistance » encouragée par Khamenei.

Propagande iranienne à l'étranger : Londres, cette porte d'entrée sur le monde

En juin 2020, l'AIM a partagé une vidéo dans laquelle l'ayatollah Araki a réagi à la mort de George Floyd, affirmant que les États-Unis « ont empêché le monde entier de respirer » 

L'AIM a dénoncé les mauvais traitements infligés aux musulmans en Arabie saoudite, aux États-Unis et au Nigeria, ainsi qu'aux Ouïghours en Chine et aux Tchétchènes en Russie, mais la mission n'a pas encore évoqué la violence d'État contre les musulmans, y compris des religieux chiites, en Iran. Haidari a écrit que l'AIM avait été « ciblée » par le passé: 

« Nous nous opposons aux nombreuses tentatives de laïcisation des musulmans en Occident. Notre position naturelle a toujours été et restera toujours celle de l'amour et du respect pour d'autres organisations et centres, y compris le Centre islamique d'Angleterre, le bureau de l'ayatollah Khamenei, que nous considérons comme notre maison naturelle. » 

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Liste non exhaustive de personnes agissant pour la promotion des fondements religieux de la République islamique d’Iran

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